«Une maison du cinéma entièrement financée par des privés»

A notre invitation, Didier Zuchuat prend la plume. Ce passionné, administrateur de deux salles à Genève, ambitionne de dédier le bâtiment des Philosophes au 7e Art

En préliminaire, il est observé que les gens de théâtre ont exprimé de longue date et de façon réitérée leur souhait de voir déménager la Comédie dans de nouveaux locaux ; les pouvoirs publics ont investi très largement pour réaliser le projet ambitieux de la nouvelle Comédie sur le site de l’ancienne Gare des Eaux-Vives et le Conseil municipal, sur la ferme intervention d’une partie de la députation, a accepté un principe prudent visant à limiter les incidences budgétaires: le spectacle vivant devrait être désormais banni de l’ancienne scène des Philosophes afin d’éviter la multiplication de lieux subventionnés.

Une maison ouverte 365 jours par an

La situation ayant été clairement établie afin de faire voter les budgets nécessaires, il semble utile de réfléchir aujourd’hui à une nouvelle affectation pour le vénérable bâtiment édifié en 1911-1912 par l’architecte genevois Henry Baudin et ayant abrité depuis son inauguration en janvier 1913 les arts dramatiques certes, mais également le cinématographe muet ainsi que des projections de films sonores. Ainsi, il a été dégagé l’idée fédératrice de créer une « Maison du Cinéma » ouverte 365 jours par an et du matin au soir – et non pas un multiplexe comme certains se plaisent à s’en faire l’écho (!) – abritant des salles de projection de tailles diverses autour de la grande salle historique remise en valeur et sous le château de scène mais également une filmothèque et une bibliothèque thématique ainsi qu’un lieu convivial de rencontre, le Ciné Café.

Le soutien des professionnels de la branche

Un projet voulu et porté par des professionnels de la branche cinématographique locale qui souhaitent ainsi disposer d’une vitrine de qualité pour leurs productions et co-productions qui sont nombreuses et comptent sur le plan international; un projet par ailleurs entièrement financé par des intérêts privés n’ayant pas recours aux deniers publics et garantissant la remise en valeur dans les règles de l’art d’un bâtiment nécessitant des soins d’entretien particuliers et de coûteux travaux, soit sa pérennité durant toute la durée du droit de superficie accordé par la Ville de Genève en sa qualité de propriétaire ne souhaitant pas investir à fonds perdus dans sa réaffectation.

Comme plusieurs lieux dédiés en priorité à la culture cinématographique en Ville de Genève se sont mutés en locaux polyvalents inadaptés (l’ancien cinéma LE PARIS devenu Auditorium Arditi) ou ont été abandonnés purement et simplement (les cinémas CENTRAL et RIALTO) voire démolis ou en passe de l’être ( LE PLAZA actuellement, après beaucoup d’autres) ou reconvertis pour d’autres usages (l’ancien cinéma et music-hall ALHAMBRA, les anciens cinémas ÉLYSÉE, VOLTAIRE, CAMÉRA 2000 sans oublier le HOLLYWOOD, LES GROTTES et le BROADWAY), ce serait donc un juste retour de balancier de dédier au 7e Art des locaux emblématiques et bien situés.

Ceux-ci trouveraient ainsi une nouvelle jeunesse parés de leur plus beaux atours, le projet ne prévoyant pas de modification des façades ni de la distribution intérieure actuelle qui est aménagée en plusieurs espaces de théâtre, répétitions, loges, régies et scène.

Il y a déjà beaucoup de lieux alternatifs plus ou moins utilisés et subventionnés en Ville de Genève ; les arts cinématographiques restent le parent pauvre du subventionnement municipal et la Maison du Grütli n’est affectée que partiellement au cinéma alors que le projet initial prévoyait une présence beaucoup plus marquée dans cette ancienne école qui accueille des projections dans ses caves, le rez-de-chaussée restant notoirement sous-exploité : il est nécessaire d’améliorer cette situation.

Didier Zuchuat