Vie secrète du chantier, épisode 19

Devant l’objectif d’Eddy Mottaz, la Comédie des Eaux-Vives a parfois des airs de décor de cinéma

Un escalier dans une lumière or et charbon de thriller. En cette fin d’automne, la Comédie des Eaux-Vives n’est plus tout à fait un chantier. Les équipes du théâtre – techniques, artistiques, administratives – sont désormais dans la place, histoire d’apprivoiser la fabrique à fictions.

A sa façon élégante et picturale, notre photographe Eddy Mottaz dessine lui aussi des micro-histoires, de visions insolites en images évocatrices. Voyez celle-ci: elle dessine un passage secret entre deux étages, deux mondes, allez savoir. On pourrait redouter l’embuscade. Mais des foyers lumineux suggèrent une échappatoire.

En réalité, cet escalier côtoie l’une des deux salles de la Comédie, la petite, celle qu’on dit modulable: il permet de rejoindre au sous-sol un vestiaire. Eddy Mottaz raconte avoir été séduit par la pénombre. Ce jour-là, les lampes ne se sont pas allumées, comme elles auraient dû. L’occasion était trop belle: n’y avait-il pas là comme un décor de cinéma?

On se surprend à rêver sur ces marches: les descendre, c’est se sentir comme Ulysse rejoignant le pays des ombres pour consulter le devin Tirésias, avant de mettre le cap sur Ithaque, après dix ans d’errance; les monter, c’est courir après la lumière d’un rivage inédit.

Les images d’Eddy Mottaz ont ce pouvoir: leur climat stimule l’aventure intérieure. Cela tombe bien: les théâtres poussent à larguer les amarres.